Everyone wants to go to Japan
Claudia Ballerini|
français Un ami m’a dit qu’il voulait aller au Japon cet été. Tout le monde veut aller au Japon. On dit Japon, on dit wabi-sabi: la célébration de l’imperfection, du transitoire et de la simplicité. Dans un monde d’essencialisme pur, de force discrète et de "minimalisme" (oui, ce mot est galvaudé), le moindre détail—une fissure, un nœud, un léger dégradé—devient puissant et presque sacré. Nous, bons Occidentaux, avons repris ce concept, l’avons commercialisé, reproduit dans nos appartements de ville, et essayé de donner un sens à la fugacité de la vie après douze heures devant l’ordinateur. Nous courons alors après le canapé crème, le tabouret en bois naturel, le vase fissuré de cette céramiste du Marais qui peint ses fissures à l’or. Ornament und Verbrechen. Oui, Adolf Loos. Mais une question se pose : cette privation d’ornement peut-elle entraîner une perte d’identité et accélérer l’ère du Fast Design ? Inévitable de penser que certains savoir-faire sont en train de disparaître, non pas par manque de charme, mais simplement parce qu’ils ne servent plus. Et si quelque chose ne sert plus, dans notre monde, il meurt. “Less is more”. Nous avons adopté l’idée que « moins c’est mieux », mais avons oublié de demander : mieux que quoi ? Peut-être qu’un jour, nous redécouvrirons le plaisir d’une broderie, d’une frise, d’une sculpture. Pas parce que ça “sert”, mais parce que la beauté, parfois, est un droit. photo de Sava Bobov sur Unsplash photo de Daniel Chen sur Unsplash |
english A friend told me he wants to go to Japan this summer. Everyone wants to go to Japan. Say Japan, and you say wabi-sabi: the celebration of imperfection, transience, and simplicity. In a world of pure essentialism, quiet strength, and "minimalism" (yes, overused), the tiniest detail—a crack, a knot, a subtle shade—becomes powerful, almost sacred. As Westerners, we borrowed this concept, commercialized it a little, reproduced it in our city apartments, and tried to find meaning in life’s fleeting moments after twelve hours in front of a computer. We chase the cream-colored sofa, the natural wood stool, the cracked vase by that ceramicist from the Marais - Artsy, chic quarter of Paris- who gilds the fractures in gold. Ornament und Verbrechen. Yeah, Adolf Loos. But one question arises: can this deprivation of ornament lead to a loss of identity and accelerate Fast Design? Inevitably, some crafts are disappearing—not because they’ve lost their charm, but simply because they’re no longer “useful”. And if something isn’t useful, in our world, it dies. “Less is more.” We adopted the idea that “less is better”, but forgot to ask: better than what? Perhaps one day we will rediscover the joy of embroidery, friezes, and sculpture. Not because it “serves a purpose,” but because sometimes, beauty is a right. photo by Sava Bobov on Unsplash photo by Daniel Chen on Unsplash |
